Sohrâb Sepehrî |
Oasis dans l'instant
Si vous venez me chercher quelque part,
Je serai en un lieu nulle part [1].
Derrière ce nulle part, il y a quand même quelque part.
Derrière ce nulle les veines de l'air
Sont pleines de chardons qui nous apportent les messages [2]
De ces fleurs épanouies sur les confins des terres lointaines.
Et le sable porte aussi l'empreinte des chevaux
De ces fringants cavaliers qui ont franchi à l'aube
Les hauteurs ivres de l'assomption des fleurs.
Derrière ce nulle part, le parasol du désir reste à jamais ouvert :
Et quand le souffle de la soif frémit dans la racine d'une feuille
Les cloches de la pluie se mettent à sonner.
Ici l'homme est tout seul
Et dans cette solitude
L'ombre de l'orme s'étend jusqu'à l'éternité.
Si vous venez m'y chercher,
Venez-vous-en donc lentement et doucement
De crainte que ne se raye
La porcelaine de ma solitude.
[1] Un lieu nulle part : Hishestan, on songera au Na Koja Bad, le pays du non-où de Sohravardi
[2] Chardons : Qasadeh, fleur messagère en Iran
Sohrâb Sepehrî, Les pas de l'eau, Orphée La Différence
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