Mausolée de Ghalib à Delhi. Ghalib fut un poète bon vivant et libre-penseur. Il était à Delhi lors de la révolte des Cipayes en 1857 et tint un journal qui nous décrit les horreurs de la répression sanglante menée par les Anglais pour reprendre la capitale moghole. Lors de cette répression, Ghalib fut emmené devant un officier anglais qui lui demanda s'il était musulman. Ghalib répondit
- "A moitié seulement".
- "Qu'entends-tu par là ?" demanda l'officier amusé et intrigué.
- "Je bois du vin mais je ne mange pas de porc", lui répondit le poète.
Ghalib eut la vie sauve sur présentation d'une lettre envoyée par la Reine d'Angleterre en remerciement à un poème qu'il lui avait adressé.
Ghalib (1797-1869) est considéré comme l'un des plus grands poètes de langue ourdoue. L'ourdou est né à partir du XVIIe siècle de la rencontre des langues de l'Inde du nord, notamment le hindi, avec le persan et l'arabe. Celui qui comprend le hindi, comprend également l'ourdou et vice versa. Alors que le hindi comporte un nombre important de mots d'origine sanskrite, l'ourdou se caractérise par la quantité de mots d'origine persane et arabe dans son vocabulaire. Aussi, l'ourdou est associé à la culture musulmane en Inde. Rappelons que l'ourdou est la langue nationale du Pakistan. De plus, il s'écrit avec l'alphabet arabe et dans un style calligraphique appelé le nastaliq qui est apparu en Iran au XVe siècle.
Le ghazal est le genre poétique le plus connu de l'ourdou. Le mot ghazal vient de la racine arabe gh-za-la qui signifie "courtiser une femme". En schématisant, on peut ramener le ghazal a trois caractéristiques principales :
- c'est un poème lyrique court (entre cinq et vingt-cinq vers maximum)
- c'est un poème rimé et rythmé dont la longueur des vers est définie en pieds (un pied peut être composé d'une voyelle brêve et trois longues)
- chaque vers peut être déclamé d'une manière indépendante, même sorti de son contexte, car il possède un sens entier à lui tout seul.
Poème de Ghalib :
"L'espoir, nous n'en avons plus, de visages, nous n'en voyons plus,
le jour de notre mort est décidé, pourquoi, la nuit durant, le sommeil ne vient plus ?
Avant, notre coeur se prenait à rire, et voilà qu'il ne sourit jamais plus,
je connais le fruit de la dévotion et de l'ascèse, mais mon humeur ne m'y porte plus.
Il y a bien quelque chose que je tais, sinon pourquoi est-ce que je n'en parle plus ?
Pourquoi ne crierai-je pas qu'on se souvienne, mais si ma voix ne porte plus ?
La cicatrice de mon coeur ne se voit pas, mai le parfum du bonheur ne vient plus,
nous sommes là où les nouvelles de nous-mêmes ne nous parviennent même plus.
Nous mourons du désir de mourir, la mort vient et voilà qu'elle ne vient plus.
Quel visage montreras-tu à la Kaaba, Ghalib,
avec cette honte que tu ne ressens plus ?"
Poème de Ghalib tiré de Reflets du Ghazal, poèmes traduits par Alain Désoulières, Buchet Chastel, p. 25
Ghazal de Ghalib. Comme on le voit l'ourdou s'écrit avec l'alphabet arabe augmenté de quelques lettres propres à l'ourdou et s'écrit avec le style calligraphique du nastaliq
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire