Avis personnel :
Magnifique petit essai de Barjavel sur le sens de la vie, la place de l’homme dans l’Univers et sa relation avec le Divin.
L’ouvrage est écrit dans un style simple, clair et concis. A aucun moment, Barjavel ne part dans des envolées métaphysiques ou n'utilise un vocabulaire abstrus ou philosophique. C’est un ouvrage sans prétention, écrit sur un ton confidentiel et direct, Barjavel interpellant fréquemment le lecteur et s’adressant directement à lui. L’auteur se pose une série de questions existentielles et nous propose modestement son point de vue et tente d'apporter des réponses. Le livre aborde quantité de thèmes (religion, spiritualité, écologie, science,…) mais quelques sujets principaux se dégagent parmi les autres.
Tout d’abord, la religion. Même si Barjavel lance des attaques virulentes contre les représentants des religions et les accuse d’avoir perdu la signification essentielle des textes révélés et leur reproche de maintenir les hommes dans l’ignorance en proposant une interprétation puérile et sociale des religions, il se déclare néanmoins croyant et nous propose une approche de la religion basée sur le sens spirituel et symbolique des Ecritures. Pour preuve, cette étonnante exégèse digne d’un mystique chrétien, d’un soufi ou d’un chiite à laquelle l'auteur se livre concernant le passage biblique évoquant Moïse revenant vers son peuple avec les deux tablettes de la Loi qu’il vient de recevoir de Dieu sur la montagne. Pour Barjavel, ces deux tablettes représentent les deux aspects de la foi, l’exotérique et l’ésotérique, le premier destiné au peuple et le second réservé aux seuls initiés.
Il ne fait pas de doute pour Barjavel qu’un Etre suprême, qu’il hésite à appeler Dieu tant ce mot est devenu chargé de clichés puérils, gouverne le monde et est à l’origine de sa création. L’extrême organisation et harmonie qui existent dans la nature ne peuvent être le fruit du hasard. Si un singe tapait pendant l’éternité sur le clavier d'une machine à écrire, jamais pour autant on n’obtiendrait l’intégralité de la Bible ou ne serait -ce que le texte de La Cigale et de la fourmi. Pour corroborer ses propos, Barjavel nous décrit minutieusement l’oreille de l’homme. L’extrême ingéniosité de sa constitution physique et l’agencement particulièrement adroit des différents éléments qui la composent sont des témoignages évidents que quelqu’un les a conçus et organisés de la sorte. Il n'y a aucun doute, nous dit Barjavel, qu’« il y a quelqu’un sous le lit ou dans le placard ».
Tout le livre est traversé par une quête de sens. Il s’agit pour l’homme d’essayer de se comprendre, de réfléchir sur la place qu'il occupe dans la Création et des liens qui l'unissent au Divin. Les textes sacrés contiennent en eux, sous la carapace du sens exotérique et des images, des significations ésotériques propres à mettre l’homme sur le chemin de la Vérité. Il s’agit de retrouver la clef d’entrée pour accéder aux mystères contenues dans la Révélation. L'Église ne peut pas nous mettre sur la voie car elle a perdu cette clef. Mais celle-ci peut être retrouvée en se tournant vers les initiés qui l’ont conservée par devers eux et qui par leur enseignement secret peuvent nous ouvrir les portes du Mystère.
La faim du tigre est marqué par l’enseignement ésotérique de Guénon et de Gurdjieff. Dans une interview accordée en 1973 à la revue Hamsa, Barjavel avait déclaré : « Je dois dire que Guénon a eu une très grande importance dans ma formation. Guénon... et Gurdjieff aussi, bien qu'ils aient été opposés (je crois qu'ils regardaient la même chose, mais de deux côtés différents). En tous cas, il est certain que là est le grand problème : essayer de retrouver la Tradition, essayer de retrouver la vérité. Mon petit bouquin « La Faim du Tigre », c'est ça ! C'est l'histoire de ma recherche." Dans une autre intervieuw, il avait déclaré toujours à propos du même livre : "Je donnerais tous mes autres livres pour celui-ci." Moi-aussi.
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