Sindbad PUZZLE

Retrouvez des chefs-d'oeuvre de la miniature persane et indienne en PUZZLES sur le site : http://www.sindbad-puzzle.com/

jeudi 22 juillet 2010

William Dalrymple : "Le dernier Moghol"


4e de couverture :

"Rangoon. Novembre 1862. Par une après-midi humide et brumeuse, peu après la fin de la mousson, un cadavre enveloppé dans un linceul est porté par un petit détachement de soldats britanniques jusqu'à une sépulture anonyme au pied d'une prison fortifiée. "Plus aucun vestige ne permettra de distinguer où repose le dernier des Grands Moghols", murmura avec un soupir de soulagement le haut-commissaire anglais en poste à cette époque. Né en 1775, Bahadur Shah II, également connu sous son nom de plume, Zafar, a été le dernier empereur moghol, descendant direct de Genghis Khan. Mais de royal, Zafar n'avait plus que son sang et son nom. Dépossédé de ses droits et de ses pouvoirs par la Compagnie anglaise des Indes orientales, il n'en était pas moins un poète raffiné, un remarquable calligraphe, et l'artisan d'une des lumineuses renaissances de l'histoire de l'Inde. En 1857, Delhi, sa capitale prospère, est le théâtre sanglant de la plus violente des insurrections que l'Empire britannique eut à affronter. Près de deux cent mille soldats indiens se soulevèrent avec fureur ; ce fut la révolte des Cipayes, bénie par Zafar, réprimée par les Anglais, qui réduisit à l'état de ruines et de cendres la plus belle ville de l'Hindoustan et le berceau de la magnificence moghole. Le Dernier Moghol est le portrait poignant de Delhi la Fabuleuse, personnifiée par Zafar, et de leur destin tragique à tous deux lors de la terrible destruction de la ville dans cette catastrophe de 1857. Après Le Moghol Blanc (Noir sur Blanc, 2005), et à la lumière d'un riche trésor d'archives en ourdou et en persan jamais exhumées avant lui, William Dalrymple raconte avec la même ferveur, la même truculence et le même sens du détail la fin de la dynastie des Moghols - formidable synthèse de tolérance religieuse entre l'Inde et l'Islam - qui prend une dimension étrangement contemporaine."

William Dalrymple, Le dernier moghol, Les éditions noir sur blanc

Mon avis :

Le dernier Moghol est un livre passionnant qui se lit comme un roman en dépit de son contenu historique extrêmement fouillé (les références aux sources couvrent une centaine de pages à la fin du livre). William Dalrymple parvient tout au long du livre à tenir notre intérêt en haleine et à nous émouvoir profondément en nous citant de nombreux extraits d'échanges épistolaires qui nous font pénétrer dans l'intimité des protagonistes et en nous relatant de nombreuses anecdotes qui nous font ressentir avec une acuité particulière l'ampleur du drame vécu par tous ces personnages happés par le tourbillon des événements.
Le livre est centré autour de la personne de Bahadur Shah et des événements qui se déroulèrent à Delhi. On peut simplement regretter que l'on n'ait pas un panorama plus large de la révolte des Cipayes avec une narration, même brève, de la mutinerie dans d'autres parties et villes de l'Inde.
Quelle tristesse de constater que Delhi, l'une des plus belles villes du monde, comportant des palais fabuleux, tel celui du Fort Rouge, et des monuments splendides (mosquées, caravansérails, demeures de notables...) fut en grande partie détruite après la reconquête de la ville par les Anglais. Signalons également que bien que les hindous furent majoritaires parmi les mutins, ce fut essentiellement les musulmans et les monuments islamiques qui firent les frais de la vengeance des Britanniques. Il faut avouer que William Dalrymple n'explique pas véritablement les raisons à cela. On peut supposer que c'est parce la dynastie des Moghols était musulmane et que de nombreux mudhahidins vinrent rejoindre les mutins.
Enfin, disons un mot sur l'islam pratiqué par les souverains moghols. C'était un islam d'un syncrétisme remarquable, ouvert sur les différences et profondément tolérant. Ainsi, les Moghols ne buvaient que de l'eau provenant du Gange, rendaient visites aux ascètes hindous, se recueillaient sur les tombes des saints hindous, épousaient des hindoues... William Dalrymple montre que musulmans et hindous reconnaissaient unanimement l'autorité du souverain Moghol, en dépit de ce que la droite nationaliste hindoue cherche à faire croire au peuple aujoud'hui, à savoir que la dynastie moghole était étrangère à l'Inde et constituait une domination des musulmans sur les hindous. Il est triste de constater que même les extrémistes musulmans se joignent, pour d'autres raisons, aux fanatiques hindous pour condamner les Moghols. Pour les fondamentalistes musulmans, la pratique syncrétique des Moghols est perçue comme une hérésie et un dévoiement par rapport à une conception d'un islam pur et authentique dont ils estiment prétentieusement être les détenteurs.
L'islam syncrétique des Moghols était, par delà un choix reposant sur le bon sens politique, basé sur une conception religieuse tirée du soufisme prônant avant toute chose la tolérance, la paix, l'amour et l'harmonie entre les hommes.
Le dernier Moghol est conseillé à les curieux et les passionnés de la civilisation indo-musulmane ainsi qu'à tous les amateurs d'un islam tolérant et ouvert sur l'autre et les arts.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire