Sindbad PUZZLE

Retrouvez des chefs-d'oeuvre de la miniature persane et indienne en PUZZLES sur le site : http://www.sindbad-puzzle.com/

lundi 31 janvier 2011

Tagore : Accept me

Tagore

Accept me, dear God, accept me for this while.
Let those orphaned days that passed without You be forgotten.
Only spread this little moment wide across Your lap, holding it under Your light.
I have wandered in pursuit of voices that drew me, yet led me nowhere.
Now let me sit in peace and listen to Your words in the soul of my silence.
Do not turn away Your face from my heart's dark secrets, but burn them till they are alight with Your fire.

Rabindranath Tagore, The heart of God. Prayers of Rabindranath Tagore, Tuttle Publishing.

mardi 25 janvier 2011

Tobias Wolff : "Old School" ("Portrait de classe")



4e de couverture :

"At one prestigious American public school, the boys like to emphasise their democratic ideals - the only acknowledge snobbery is literary snobbery. Once a term, a famous writer visits and a contest takes place. The boys have to submit a piece of writing and the winner receives a private audience with the visitor. But then it is announced that Hemingway, the boys' hero, is coming to the school. The competition intensifies on - honour, loyalty and friendship - are crumbling under the strain. Only time will tell who will win and what it will cost them."

Avis personnel :


Old School se déroule dans un établissement privé d’enseignement secondaire. La particularité de cet établissement est qu'enseignants et élèves sont férus de littérature. Toute la vie de l'école gravite autour des lettres : on dévore les livres, on écrit furieusement et on débat avec passion. La ferveur littéraire atteint son paroxysme lors de la visite dans l'école, chaque trimestre, d'un écrivain célèbre. A cette occasion, un concours littéraire est organisé parmi les élèves de dernière année. Le lauréat est récompensé par la publication de son écrit en première page dans le journal de l’école et reçoit l’honneur exceptionnel de se voir accorder un entretien privé avec l’écrivain.
Old School est écrit dans un style simple et clair. Tobias Wolff excelle à décrire avec beaucoup de subtilité et de pénétration psychologique les tiraillements intérieurs, les sentiments et les émois provoqués dans une âme juvénile par la rencontre et la confrontation avec le monde des adultes. Tobias Wolff nous montre comment la lecture et l’écriture peuvent jouer, chez l'adolescent, un rôle déterminant dans le développement d'un raisonnement lucide et pertinent sur les problématiques du monde, dans l'approfondissement de la connaissance de soi et dans la faculté d'interagir avec ses semblables dans la société. Mais Old School est bien plus que cela. C'est avant tout une histoire profondément émouvante sur le parcours de vie et le destin des principaux protagonistes du livre : le narrateur, le doyen de l'école, le professeur de lettres. Le ton du récit tout au long du livre est tout à la fois tendre, drôle, ironique et doux-amer.
Il est curieux que ce livre, un best-seller aux Etats-Unis, n’ait pas eu plus de succès en France, pourtant pays de la culture et des belles lettres, où il passe quasiment inaperçu. C’est un livre à mettre entre les mains de tous les amoureux des livres et des écrivains en herbe. Old School montre de façon remarquable le rôle salutaire que peut jouer la littérature dans la construction de la personnalité, dans la formation d'un esprit critique, et dans l'épanouissement d'une conscience citoyenne chez les sujets jeunes.
Une traduction de ce livre est disponible en français sous le titre "Portrait de classe", chez Plon.

lundi 24 janvier 2011

Robert Frost : Aspiration to the light and Form in poetry

"Grieving Patroklos", by Troy Caperton

"- Stopping by Woods on a Snowy Evening", Frost said. He put both hands on the pulpit and peered at Mr. Ramsey.
- [Mr Ramsey :] Yes, sir. Now that particular poem is not unusual in your work for being written in stanza form, with iambic lines connected by rhyme.
- Good for you, Frost said. They must be teaching you boys something here. [...] You had a question ?
- Yes, sir. The question is whether such a rigidly formal arrangement of language is adequate to express the modern consciousness. That is, should form give way to more spontaneous modes of expression, even at the cost of a certain disorder ?
- Modern consciousness, Frost said. What's that ?
- Ah! Good question, sir. Well - very roughly speaking, I would describe it as the mind's response to industrialization, the saturation propaganda of governments and advertisers, two world wars, the concentration camps, the dimming of faith by science, and of course the constant threat of nuclear annihilation. Surely these things have had an effect on us. Surely they have changed our thinking.
- Surely nothing. Frost stared down at Mr Ramsey.
If this had been the Las Judgement, Mr. Ramsey and his modern consciousness would've been in for a hot time of it. He couldn't have looked more alone, standing there.
- Don't tell me about science, Frost said. I'm something of a scientist myself. Bet you didn't know that. Botany. You boys know what tropism is, it's what makes a plant grow toward the light. Everything aspires to the light. You don't have to chase down a fly to get rid of it - you just darken the room, leave a crack of light in a window, and out he goes. Works every time. We all have that instinct, that aspiration. Science can't - what was your word? dim? - science can't dim that. All science can do is turn out the false lights so the true light can get us home.
Mr. Ramsey began to say something, but Frost kept going.
- So you don't tell me about science, and don't tell me about war. I lost my nearest friend in the one they call the Great War. So did Achilles lose his friend in war, and Homer did no injustice to his grief by writing about it in dactylic hexameters. There've always been wars, and they've always been as foul as we could make them. It is very fine and pleasant to think ourselves the most put-upon folk in history - but then everyone has thought that from the beginning. It makes a grand excuse for all manner of laziness. But about my friend. I wrote a poem for him. I still write poems for him. Would you honor your own friend by putting words down anyhow, just as they come to you - with no thought for the sound they make, the meaning of their sound, the sound of their meaning? Would that give a true account of the loss?
Frost had been looking right at Mr. Ramsey as he spoke. Now he broke off and let his eyes roam over the room.
- I am thinking of Achilles' grief, he said. That famous, terrible, grief. Let me tell you boys something. Such grief can only be told in form. Form is everything. Without it you've got nothing but a stubbed-toe cry - sincere, maybe, for what that's worth, but with no depth or carry. No echo. You may have a grievance but you do not have grief, and grievances are for petitions, not poetry."

Tobias Wolff, Old School, Bloomsbury

vendredi 21 janvier 2011

Hallâj : "Les brises de Sa pitié"

Photo Robert Swier

 "Un des signes de Sa toute-puissance est qu'Il envoie les "brises de Sa pitié" [Coran, VII, 57] vers les coeurs de Ses amoureux, leur portant la bonne nouvelle que les voiles de la réserve vont s'écarter, pour qu'il parcourent sans crainte toute l'étendue de l'amour : et qu'Il les abreuve aussi largement du breuvage de la joie. Et les souffles de Sa générosité passent sur eux, - ils les bannissent de leurs qualités et les ressuscitent en Ses qualités et Ses attributs même, car nul ne peut fouler le tapis étendu de la Vérité, tant qu'il demeure au seuil de la séparation, tant qu'il ne voit en toutes les essences une seule Essence, tant qu'il ne voit ce qui passe comme périssant, et Celui qui demeure comme Subsistant".

Louis Massignon, La Passion de Hallâj, Gallimard, 1975, t. III, p. 49

mercredi 19 janvier 2011

Hallâj : L'Humanité de Dieu


A qui al-Hallâj fait allusion dans les vers ci-dessous ? Massignon y voyait Jésus en tant que manifestation du fiat divin. Certains soufis y verraient Khidr, les chiites, leur Imâm en tant que Mazhâr-e Khuda et les Hindous, Rama ou Krishna. Jésus avait été un sujet de méditation de prédilection pour al-Hallâj. Ne déclarait-il pas qu'il mourrait dans "la religion de la Croix" ? Et Massignon avait relevé dans le vocabulaire hallâgien l'empreinte importante des qarmates. Toujours est-il que les propos d'al-Hallâj sont particulièrement intrigants et mystérieux.

"Subhâna man azhara nâsûtuhu..." :

Louange à Celui qui, dans son Humanité, a manifesté (aux Anges)
Le mystère de la gloire de Sa Divinité radieuse !
Et qui, depuis, S'est montré à Sa créature (humaine), ouvertement.
Sous la forme de quelqu'un "qui mange et qui boit"
[1].
Si bien que Sa créature a pu Le voir face à face,
Comme le clin d'oeil (va) de la paupière à la paupière !


Louis Massignon, La Passion de Hallâj, Gallimard, 1975, t. I, p. 113
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[1] "âkil wa sharib", ces termes visent Jésus dans le Coran, au verset V, 75

lundi 17 janvier 2011

Les Riwayât d'al-Hallâj



Les Riwayât de Hallâj sont des hadith qudsi c'est à dire des hadith où l'on fait parler Dieu à la première personne. Comme pour tous les hadith, les Riwayât sont composées de deux parties : l'isnad (la chaîne des rapporteurs ou témoins par lesquels le hadith a été transmis) et le matn (le corps du texte). Mais dans les isnad des Riwayât, Hallâj ne donne pas de noms de transmetteurs, il les remplace par l'invocation d'une série de phénomènes naturels (nuage, arc-en-ciel, tonnerre, éclair, vent ...) et par des symboles coraniques (le Jujubier du limite, la Tablette bien gardée, le grand Ange...). Al-Hallâj prend ainsi les phénomènes naturels et les symboles coraniques comme témoins, garants et preuves de l'authenticité des hadith qudsi qu'il énonce. A bien des égards, les Riwayât nous font penser à certaines sourates de la période mecquoise qui débutent par des serments : "par la nuit, par l'aurore, par l'étoile à son lever...".
Selon Louis Massignon, les Riwayât font partie de la toute première période littéraire de Hallâj. Au nombre de vingt-sept en tout, elles se caractérisent par leur brièveté et leur simplicité ; ce sont essentiellement des exhortations populaires à mener une vie intérieure fervente, pleine de piété et de renoncement.

En voici quelques unes de ces Riwayât :

Riwaya VII :

"Par le rêve véridique, par l'ange sage, par le grand Kérub[l'ange Isrâfil ou Azraël], par la Tablette bien gardée, par la Science : "Nul n'adore Dieu par un acte qui Lui soit plus agréable qu'en L'aimant."

Riwaya XI :

"Par le nuage amoncelé, par l'éclair qui ravit, par le tonnerre sacré, par l'ange de la grâce, - par cette énergie tenue en réserve, dont les cataractes bruissent dans le mystère, à l'horizon de la lumière, entre le soleil et la lune : "Le Qur'ân est la résurrection, et le monde est le signe du paradis et de l'enfer. Heureux celui que la connaissance du Créateur détache de celle du créé !"

Riwaya XXI :

"Par l'heure des heures, par la beauté, par la grâce, par la volonté intime, de la part de Dieu : "L'amour de Mes amis démontre Mon amour, la volonté de Mes saints démontre Ma volonté, le précepte de Mes sages démontre Mon précepte. Tout ce qui existe, existe de par Ma science, Ma puissance et Ma volonté."

Louis Massignon, La Passion de Hallâj, Gallimard, 1975, t. III, pp. 344-352

dimanche 16 janvier 2011

Hallâj : La prière de l'aube

Etienne Dinet, La prosternation, prière au lever du jour
Hallâj, Riwâya I :

"(Ceci m'est annoncé :) par l'esprit vivifiant, la lueur de l'ouïe et la vision de l'homme, toutes deux de la part de l'Absolu, du mystère, du Nom évident, de Dieu : "que la race d'Adam ne M'offre pas de culte plus agréable que la prière, prosternée à terre, au moment de la fin de la nuit".

Louis Massignon, La Passion de Hallâj, Gallimard, 1975, t. III, p. 345

Hallâj : Muhammad et sa descendance


Riwâya XVIII d'al-Hallâj :

"Par la nature (de l'homme), par l'ombre étendue, par le témoin exalté, par la clarté incomparable : "Dieu n'a jamais créé de nature humaine plus affectionnée par Lui que (celle de) Muhammad et (de) sa descendance ('itra) : ils ont toutes les qualités (khulq) pour le Paradis."

Louis Massignon, La Passion de Hallâj, Gallimard, 1975, t. III, p. 348

vendredi 14 janvier 2011

Hallâj : Sauvez-moi de Dieu


"Ibn Marduyé a dit :

"J'ai vu Hallâj, dans le sûq al-Qata'i, pleurer, plein de chagrin, et s'écrier : "ô gens ! sauvez-moi de Dieu (à trois reprises) ! - puis il récita : car Il m'a ravi à moi-même, et Il ne me rend pas à moi-même ! et je ne puis Lui témoigner les égards dus à sa présence, car j'ai crainte de son abandon. - Alors, Il me laissera désert, délaissé, proscrit ! et malheur à celui que se sent désert après la Présence et abandonné après la Jonction ! - et l'on pleurait."

Louis Massignon, La Passion de Hallâj, Gallimard, 1975, t. I, p. 329

Hallâj : Ma barque s'est brisée


"Oui, va-t-en prévenir mes amis que je me suis
embarqué en mer et que ma barque s'est brisée
C'est dans la confession de la Croix que je mourrai
je ne me soucie plus d'aller à la Mekke ni à Médine !"

Louis Massignon, La Passion de Hallâj, Gallimard, 1975, t. I, p.

Hallâj : Rien que Toi


"J'ai étreint, de tout mon être, tout Ton amour, ô ma Sainteté ! Tu T'es tant manifestée qu'il me semble qu'il n'y a plus que Toi en moi !"

Louis Massignon, La Passion de Hallâj, Gallimard, 1975, t. I, p. 331

Hallâj : L'emprise de la Vérité


"Ahmad Ibn Fâris a dit :
"J'ai vu Hallâj dans le sûq al Qati'a, - debout, devant la porte de la mosquée, et qui disait :

"O gens ! Quand la Vérité s'est emparée d'un coeur, - Elle le vide de tout ce qui n'est pas Elle ! Quand Dieu s'attache à un homme, Il tue en lui tout ce qui n'est pas Lui ! Quand Il aime un de ses fidèles, Il incite les autres à le haïr, afin que son serviteur se rapproche de Lui, pour consentir à Lui !"

Louis Massignon, La Passion de Hallâj, Gallimard, 1975, t. I, p. 331

mardi 11 janvier 2011

Le dernier message de Hallâj selon Massignon

"Transcendance", sculpture de Jocelyn Pratt


"Nous avons là cette double affirmation que la théologie dogmatique de Hallâj développera, et que sa prédication exposera : la pure transcendance divine, - et la présence de Dieu par sa grâce dans les âmes justes qu'elle vient sanctifier par les rites du culte. - L'ascèse négative de l'âme préconisée par Junayd n'est qu'une préparation ; l'ivresse délirante constatée chez Bistâmî n'est pas la vraie et durable présence de Dieu dans le mystique. Dans l'essence de l'union ('ayn al jam'), tous les actes du saint restent coordonnés, volontaires, et délibérés par son intelligence, - mais ils sont entièrement sanctifiés et divinisés. L'unité divine n'a pas pour résultat de détruire la personnalité du mystique, en la brisant aux rites (sabr, sahw) ou en la dissociant par l'ivresse extatique (sukr) ; elle la perfectionne, la consacre, la divinise et en fait son organe libre et vivant.
Telle est la découverte ultime, - et le dernier message exposé par la véhémente prédication de Hallâj après 295/907. Il crie sa joie d'avoir atteint, de posséder "Celui qui est au fond de l'extase", au delà du culte de la contrainte qui plie les uns à se figer dans le rite strict, - au delà du culte de l'enthousiasme qui entraîne les autres à s'exciter à l'extase par des objets créés et des procédés humains ; le terme de ces pratiques est la destruction idolâtrique de l'individualité aux pieds de la divinité impassible. Mais la mystique, selon Hallâj, n'aboutit pas là. L'union divine où elle se consomme sont des épousailles amoureuses où le Créateur rejoint enfin sa créature, où il l'étreint et où celle-ci s'épanche avec son Bien-aimé en dialogues intimes, familiers, brûlants et volubiles ; l'entretien devient continuel entre elle et cet Interlocuteur divin qu'elle possède tout au fond d'elle-même - usant avec lui du "toi et moi", - rapportant tout à lui et lui offrant tout, souffrances, désirs, regrets, espérances. Il n'y a pas de mystique arabe dont la langue amoureuse soit à la fois plus ardente et plus chaste que celle de Hallâj ; aucune transposition des symboles de l'amour profane n'en vient troubler l'élan."

Louis Massignon, La Passion de Hallâj, Gallimard, 1975, pp. 319-20

lundi 10 janvier 2011

La prière de Hallâj au mont Arafat




La prière (du'a) à la station de Arafat constitue le point culminant du pèlerinage. Après avoir imploré le pardon de Dieu pour soi et les absents, les pèlerins doivent Lui adresser une prière libre selon les désirs, les souhaits et les aspirations de leur coeur.
Al-Hallâj accomplit trois pèleringes à La Mecque durant sa vie. Un témoin nous a rapporté cette prière qu'il adressa à Dieu au mont Arafat lors de son dernier pèlerinage, en 907 :

"O Guide des égarés ! Roi glorieux, je Te sais transcendant, je Te dis au-dessus de tous les tasbîh de ceux qui t'ont dit : "Gloire à Toi !", de tous les tahlîl de ceux qui  t'ont dit : "Il n'y a de dieu que Dieu !", de tous les concepts de ceux qui T'ont conçu ! O mon Dieu, tu me sais impuissant à t'offrir l'action de grâces (shukr) qu'il Te faut. Viens donc en moi Te remercier Toi-même, voilà la véritable action de grâces ! il n'y en a pas d'autre !"

Louis Massignon, La Passion de Hallâj, Gallimard, t. I, 1975, p. 319

Iqra' : Lis


IQRA. LIS !
Premier mot de la Révélation islamique. Un ordre, une sommation, une injonction à LIRE.
Oui, lire. Rien que lire. Lire encore et toujours, ne faire que lire, lire toute sa vie. Lire partout et en tout : en un livre, en la Création, en soi.
Il n'est pas étonnant qu'en Islam, la Parole de Dieu se soit manifestée sous la forme d'un livre. L'Islam est par excellence la religion du livre. Lisons donc.

Massignon : La Passion de Husayn ibn Mansûr Hallâj

Gallimard vient de republier en 2010 dans la collection Tel, la monumentale biographie par Louis Massignon du martyr mystique de l'Islam, Husayn ibn Mansûr al-Hallâj, supplicié à Bagdad en 922.



Tome I, 4e de couverture :

Husayn ibn Mansûr Hallâj, martyr mystique de l'amour inconditionnel de Dieu, éprouvé jusqu'à la damnation volontaire, fut exécuté à Bagdad le 26 mars 922. Sa figure, sa présence accompagnèrent Louis Massignon (1883-1962), l'un des plus grands maîtres de l'orientalisme occidental, au XXe siècle, depuis sa découverte du saint en 1907, qui conduisit à la rédaction de sa thèse principale de doctorat, jusqu'à la publication du grand oeuvre dans cette édition posthume, considérablement augmentée de tous les compléments et rajouts qui furent le fruit d'une incessante quête.

« Avant sa cruelle mise à mort, Hallâj était déjà un personnage de légende et il l'est resté pour le peuple musulman. Maintenant encore, en pays arabe, il passe pour avoir été un thaumaturge gyrovague, fou de Dieu, et charlatan. Dans les autres pays d'Islam, sa physionomie de saint s'est exhaussée, intensément idéalisée, grâce à de grands poèmes persans et turcs, où son nom, Mansûr Hallâj, évoque d'emblée l'extatique déifié et crucifié qui, du haut du gibet, aura clamé le cri apocalyptique annonciateur du Jugement : me voici, la Vérité. »



Tome II, 4e de couverture :

Mars 1907, Massignon prépare au Caire un plan de recherches archéologiques et dans les textes qu'il réunit sur l'histoire du Khalifat à Bagdad « la physionomie d'al Hallâj ressortait, avec une puissance qui - écrivait Massignon - me frappa : le plus beau cas de passion humaine que j'eusse encore rencontré, une vie tendue tout entière vers une certitude supérieure. Le désir me vint de pénétrer, de comprendre et de restituer cet exemple d'un dévouement sans conditions à une passion souveraine ».

« Il n'est pas question de prétendre ici que l'étude de cette vie pleine et dure, et montante, et donnée m'ait livré le secret de son coeur. C'est plutôt lui qui a sondé le mien ; et qui le sonde encore. C'est en baissant les yeux que je salue de loin cette haute figure prométhéenne, toujours voilée pour moi, jusque dans sa nudité suppliciée : alors arrachée à la terre, enlevée, tout ensanglantée, toute déchirée de blessures mortelles, portées par la jalousie du plus ineffable Amour. »


Tome III, 4e de couverture :

L'expérience hallagienne de Louis Massignon, expérience christique et messianique, modèle la conception qu'il se fait de l'Islam et plus particulièrement du soufisme.

« Tous ces documents remués n'ont pas affaibli mon impression primitive, mais l'ont fortifiée. Il y a vraiment une vertu, une flamme héroïque, dans cette vie ; dans la mort surtout ; qui l'a scellée. J'ai été vivre, près de sa tombe, en son pays.
À l'étudier, peu à peu, ici et là, je crois avoir assimilé quelque chose de très précieux et que je voudrais faire partager à d'autres.
Heureux si d'autres que moi ressentent un jour, pour s'être familiarisés avec lui, - ce désir pressant de s'imprégner de la Vérité pleine, non pas abstraite, mais vivante, qui est le sel offert à toute existence mortelle. »


Tome IV, 4e de couverture :

« Ainsi commencé, par goût profane, pendant deux ans, cet ouvrage continué depuis par obéissance chrétienne, s'achève au bout de quatorze années.
Et maintenant, me voici de nouveau à l'orée d'un désert : entendant le vent se lever, sur le seuil de la tente, entre les pierres du foyer, à la brise avant-courrière de midi ; heure bénie, où trois passants qui s'en allaient incendier une cité perdue, s'arrêtèrent, - et offrirent à Abraham, leur hôte d'un instant, l'amitié divine. »

Avis personnel :

Monumental ouvrage pour connaître en détail la vie, la pensée et l'œuvre du martyr mystique Husayn ibn Mansur al-Hallâj mort crucifié à Bagdad en 922. Mais aussi pour découvrir avec lui la vie sociale, politique, culturelle et économique de Bagdad à l'apogée de la civilisation islamique.
Al-Hallâj entreprit de grands voyages pour porter la bonne parole au peuple et aux païens. C'est l'occasion pour nous de parcourir en sa compagnie l'empire abbâsside jusqu'à ses postes les plus avancés. On découvre alors une Umma islamique traversée de crises politiques et de tensions sociales mais également riche de sa diversité éthnique et de son pluralisme confessionnel, idéologique et culturel.
Dans le troisième tome, nous avons l'occasion de lire de nombreux textes de Hallâj magnifiquement traduits et commentés par Louis Massignon.
L'achat de ce livre représentera pour son acquéreur un investissement pour la vie tant il y a à apprendre et à méditer dans la Passion de Husayn ibn Mansûr Hallâj.

dimanche 9 janvier 2011

Al-Hallâj et la tolérance religieuse



Le prosélytisme religieux me laisse toujours perplexe. Face à un monde où les sentiments nationalistes et les intolérances religieuses ne cessent de grandir et de s'exacerber, je me demande si le prosélytisme religieux a encore sa place dans notre monde. Ne convient-il pas plutôt d'aller au devant de l'autre afin de le comprendre dans son altérité, d'établir un dialogue avec lui et de favoriser une compréhension mutuelle ? Je suis toujours surpris et gêné lorsque des Témoins de Jéhovah frappent à ma porte et tentent de me convertir à leurs croyances, comme je suis dubitatif lorsque j'entends des musulmans parler de "Tabligh". Le Coran, au verset 48, de la sourate 5, affirme clairement que la diversité des communautés est voulue par Dieu et qu'elle est un don de Sa part à l'homme. Le mystique al-Hallâj prêchait une parole à portée universaliste comme nous le montre l'extrait ci-dessous. Pour lui, l'essentiel était l'adoration de Dieu et le fait de mener une vie vertueuse, peu importe les dénominations confessionnelles.

Coran, 5, 48 : "Si Dieu l'avait voulu, il aurait fait de vous une seule communauté. Mais il a voulu vous éprouver par le don qu'il vous a fait. Cherchez à vous surpasser les uns les autres dans les bonnes actions. Votre retour, à tous, se fera vers Dieu ; il vous éclairera, alors, au sujet de vos différends." (trad. Denise Masson)

Tiré de la Passion de Hallâj de Louis Massignon :

"On rapporte d'Abdallah bin Tahir Azdi : "j'étais à me quereller avec un Juif au marché de Bagdad, et un mot m'échappa : "chien !" Passant alors à côté de moi, Mansûr al-Hallâj me regarda d'un air fâché et me dit : "ne fais donc pas aboyer ton chien !" et s'éloigna en hâte. Finie ma querelle, je le cherchai, entrai chez lui ; mais il détournait de moi son visage. Je m'excusai et il s'apaisa. Puis il me dit "mon fils, les confessions religieuses, toutes, relèvent du Dieu très Haut ; Il assigna à chaque groupe une confession, non par un choix émanant d'eux, mais en leur imposant Son choix. Quand on reproche à un autre d'appartenir à une confession erronée, c'est qu'on présuppose qu'il l'a choisie de lui-même. Sache que le Judaïsme, la Chrétienté, l'Islam et les autres dénominations confessionnelles sont des surnoms différents et des appellations contrastantes ; mais que leur But, lui, ne souffre ni différence ni contraste ; puis il récita :

"J'ai réfléchi pour donner des confessions religieuses une définition expérimentale
Et je la formule : un Principe unique à ramifications multiples.
N'exige donc pas de ton interlocuteur qu'il adopte telle ou telle dénomination confessionnelle,
Cela l'empêcherait de parvenir à l'union loyale (avec toi et avec Dieu).
C'est au Principe lui-même de venir à cet homme, et d'élucider
En lui toutes les significations suprêmes : et alors cet homme comprendra (tout)."

Louis Massignon, La Passion de Hallâj, Gallimard, t. I, 1975, pp. 238-9

samedi 8 janvier 2011

Massignon : La Passion de Hallâj


4e de couverture :

"Ce grand oeuvre reste l'un des plus hauts témoignages de l'actuel renouveau des études islamiques. Publié en deux volumes en 1922, il fit date. Mais l'ouvrage étant épuisé rapidement, nombreux étaient les savants, aussi bien d'Orient que d'Occident qui en réclamaient avec insistance la réédition.
A cette réédition, Louis Massignon ne cessa jusqu'à sa mort (1962) de travailler. Avec le souci d'objectivité scientifique et la profonde sympathie intellectuelle qui le caractérisait, il pénétrait toujours plus loin dans la connaissance du milieu bagdadien où vécut et mourut Hallâj, s'appliquant à en saisir les structures sociales aussi bien que spirituelles. Il a donc laissé un ensemble de manuscrits très élaborés qui constituent une refonte complète du texte ancien. Une importante équipe scientifique dirigée par le professeur Henri Laoust, membre de l'Institut, et M. Louis Gardet en a fait, en quatre volumes, l'édition entièrement nouvelle que voici.
Dans les deux premiers volumes, on trouvera l'évocation puissante de ce que fut Bagdad au IXe et Xe siècles, au temps du grand humanisme abbâsside, l'existence concrète du peuple, des fonctionnaires et de la cour, la signification qu'y revêtirent la vie, le procès et la mort de Hallâj (922), les prises de position des amis et ennemis du mystique, et son influence, tantôt combattue, tantôt agréée au cours des âges. Le troisième volume s'attache à la recension et à la synthèse des grands thèmes "dogmatiques" et "mystiques" qui commandèrent jadis les avancées de la pensée arabo-musulmane et qui seuls peuvent permettre de dégager en sa teneur profonde l'enseignement hallagien. Le quatrième volume est consacré tout entier aux tables, index, bibliographies et compléments indispensables à cette édition monumentale et définitive."

Avis personnel :

Monumental ouvrage pour connaître en détail la vie, la pensée et l'oeuvre du martyr mystique Husayn ibn Mansur al-Hallâj mort crucifié à Bagdad en 922. Mais aussi pour découvrir avec lui la vie sociale, politique, culturelle et économique de Bagdad à l'apogée de la civilisation islamique.
Al-Hallâj entreprit de grands voyages pour porter la bonne parole au peuple et aux païens. C'est l'occasion pour nous de parcourir en sa compagnie l'empire abbâsside jusqu'à ses postes les plus avancés. On découvre alors une Umma islamique traversée de crises politiques et de tensions sociales mais également riche de sa diversité et de son pluralisme confessionnel, idéologique et culturel.
Dans le troisième tome, nous avons l'occasion de lire de nombreux textes de Hallâj magnifiquement traduits et commentés par Louis Massignon.
Signalons enfin que Gallimard a republié en 2010 dans la collection Tel, en format poche, l'intégralité des quatre volumes de la Passion de Hallâj. Une occasion à ne pas manquer. L'achat de ce livre représentera pour son acquéreur un investissement pour la vie tant il y a à apprendre et à méditer dans la Passion de Hallâj.

vendredi 7 janvier 2011

John Keay : "The Great Arc : the dramatic tale of how India was mapped and the Everest named"


4e de couverture :

The Great Indian Arc of the Meridian, begun in 1800, was the longest measurement of the earth's surface ever to have been attempted. Its 1600 miles of inch perfect survey took nearly fifty years, cost more lives than most contemporary wars, and involved equations more complex than any in the pre-computer age. Hailed as 'one of the most stupendous works in the history of science', it was also one of the most perilous. Through hill and jungle, flood and fever, an intrepid band of surveyors carried the Arc from the southern tip of the Indian subcontinent up into the frozen wastes of the Himalayas. William Lambton, an endearing genius, had conceived the idea; George Everest, an impossible martinet, completed it. Both found the technical difficulties horrendous. With instruments weighing half a ton, their observations had often to be conducted from flimsy platforms ninety feet above the ground or from mountain peaks enveloped in blizzard. Malaria wiped out whole survey parties; tigers and scorpions also took their toll.
Yet the results were commensurate. The Great Arc made possible the mapping of the entire Indian subcontinent and the development of its roads, railways and telegraphs. India as we now know it was defined in the process. The Arc also resulted in the first accurate measurements of the Himalayas, an achievement which was acknowledged by the naming of the world's highest mountain in honour of Everest. More important still, by producing new values for the curvature of the earth's surface, the Arc significantly advanced our knowledge of the exact shape of our planet.

Avis personnel :
Mapping India relate la mission menée au début du XIXe siècle par la Trigonometry Survey de Londres pour déterminer la superficie de l’Inde. Le sujet peut paraître surprenant mais l’auteur nous replace l’intérêt d’une telle opération et ses objectifs dans le cadre de l’époque et nous précise les enjeux scientifiques qui motivaient une telle entreprise de la part des Anglais.
Le calcul de la superficie de l’Inde constitua un véritable travail de fourmi. Il s’agissait pour les géomètres de déterminer la distance entre deux points en calculant grâce à l’aide de fonctions trigonométriques les angles obtenus par le tracé d’un triangle sur une parcelle de terrain. Les géomètres progressaient ainsi sur le territoire indien en le couvrant d’un maillage de triangles successifs. L’ampleur de la tâche coûta financièrement à l’Angleterre bien plus que les guerres de conquête pour le contrôle du sous-continent indien. Le travail de traçage des triangles puis de calcul des longueurs à l’aide d’un matériel coûteux, sophistiqué, fragile et encombrant qu’il fallait transporter par monts et vaux, se révéla extrêmement long et pénible. Les géomètres et leur équipe logistique qui comprenait une cinquantaine de personnes, eurent à faire face aux nombreux dangers et menaces du territoire indien : bêtes féroces, maladies, intempéries, inondations, chaleurs extrêmes. Les tribulations de nos savants nous sont narrées par l’auteur avec beaucoup d’humour, d’autant plus que les situations incongrues auxquelles ils eurent à faire face ne manquèrent pas. L’auteur en écrivant ce livre a réussi un véritable tour de force en matière de vulgarisation. Bien que traitant de questions scientifiques pointues, le livre se lit d’une manière aisée et agréable. On s’attache aux personnages, on rit des péripéties des acteurs, on s’émeut devant l’abnégation dont font preuve les scientifiques dans leur mission et on découvre une Inde au climat implacable qui fait tomber les européens comme des mouches.
Mais Mapping India c’est aussi le récit du parcours de deux savants que tout oppose. L’un, William Lambton, modeste et effacé, doux envers ses subalternes, et tout entier dévoué à sa mission. L’autre, George Everest, orgueilleux et vaniteux, dur envers ses serviteurs, et pour qui la mission représente essentiellement une opportunité pour briller dans le monde scientifique et obtenir la reconnaissance de ses pairs. Lambton mourra dans l’anonymat dans un trou perdu de l’Inde. Everest aura la chance de voir le plus haut sommet du monde baptisé d’après son nom. Mais, après leur mort, les deux hommes sombreront invariablement dans l’oubli. A tel point que bien peu de gens aujourd’hui se souviennent d’eux et sont capables de dire d’où le mont Everest tire son nom.

lundi 3 janvier 2011

Un désir de connaissance incessant

Arbre de Pythagore

"Vers d'or de Pythagore : "Saisis, au contraire, toutes les occasions de t'instruire. Tu mèneras ainsi une vie hautement agréable."

Commentaire du Dr. Paul Carton :

"La vie est une évolution perpétuelle, un désir de connaissance incessant, un effort de volonté continue. On est sur terre pour apprendre jusqu'à l'heure de la mort. Aucun acquis matériel ou mental ne peut servir de borne à l'activité ni motiver un repos de complaisance. Ceux qui croient pouvoir stationner dans leurs insuffisances ou vivre dans une retraite inactive, dépérissent et meurent rapidement, parce qu'ils ont supprimé leur raison de vivre. On ne vit pleinement, on ne progresse rapidement, on n'est heureux véritablement, qu'en travaillant sans cesse, qu'en recherchant, comme le recommande Pythagore, toutes les occasions de s'instruire.
Tous les événements de la vie doivent donc être accueillis comme des occasions d'apprendre quelque chose, comme des moyens de perfectionner ses connaissances et ses vertus. Chaque occupation, chaque joie, chaque souffrance, chaque rencontre, chaque visite concourent ainsi à l'apprentissage du but secret de la vie, qui se cache derrière toutes les apparences matérielles. Dès que l'on veut tirer une leçon de tout et s'éduquer à tout propos, on se sent comme transporté dans un courant de vie intense, comme traversé par une force de réalisation incessante, comme soulevé et inspiré par une puissance providentielle. On mène enfin la vie hautement agréable prédite aux sages par Pythagore, parce qu'à force de recueillir des faits, d'accumuler des expériences, on finit par les coordonner et on aboutit à une synthèse de conceptions et de vie qui s'apparente à la Synthèse de l'ordre universel."

Dr. Paul Carton, La vie sage. Commentaires sur les vers d'or des pythagoriciens, Editions Alain Labussière, 2009, pp. 88-9

dimanche 2 janvier 2011

La réforme dans la douceur

Pythagore

"A côté de cela, Pythagore interdisait l'appel à la violence et à l'esprit de revendication, car ces deux modes d'hostilité font le lit de l'anarchie. "Soyez bien persuadés, enseignait-il, qu'il n'y a pas de plus grand malheur que l'anarchie".
Toute réforme doit, en effet, être conçue non pas comme une oeuvre révolutionnaire de destruction, mais comme la patiente création d'un esprit de réorganisation logique. Plutôt que de tout jeter à terre d'emblée et d'engendrer l'anarchie, mieux vaut donc attendre à l'abri des vieilles institutions que les pensées rénovatrices aient germé et que des groupes d'hommes qualifiés se soient formés et rejoints, pour établir dans l'esprit collectif, la prédominance de la vérité intégrale et de l'ordre complet."

Dr. Paul Carton, La vie sage. Commentaires sur les vers d'or des pythagoriciens. Editions Alain Labussière, 2009, p. 77

Garde ta foi jurée : l'exotérique et l'ésotérique



Pythagore recommandait dans ses vers d'or de garder sa foi jurée. Voici comment le Dr. Paul Carton, dans son ouvrage La vie sage, explique cette recommandation :

"Garde aussi ta foi jurée - Cette recommandation devait s'entendre dans un double sens. Elle concernait d'abord la fidélité dans la parole donnée. Tout engagement solennel, écrit ou verbal, doit, en effet, être considéré comme un pacte sacré, comme une parole d'honneur qui prend les forces divines, qui nous porton en nous, à témoin de notre loyauté. [...]
Puis, l'ordre de garder la foi jurée se rapportait à la doctrine pythagoricienne occulte. Il faut savoir que, dans les religions de l'antiquité, l'enseignement religieux était double. Il y avait un culte exotérique destiné au plus grand nombre, qui présentait l'idée de l'Unité divine sous un aspect multiple et anthropomorphe. Les obligations morales se trouvaient ainsi fondées sur des motifs allégoriques, mais la nécessité de mettre à la portée des foules sans instruction, les vérités transcendantales imposait ces voiles culturels. Et, d'autre part, il existait un enseignement ésotérique, donné d'une façon secrète, dans les Temples à un petit nombre d'adeptes, choisis parmi les plus dignes. Cet enseignement consistait dans la démonstration scientifique et philosophique de l'Unité divine, et enfin de l'évolution de la vie universelle à travers de multiples métamorphoses."

Dr. Paul Carton, La vie sage. Commentaires sur les vers d'or des pythagoriciens. Editions Alain Labussière, 2009, p. 35

Fondement ésotérique et tolérance religieuse


Différentes religions, un seul Dieu

"En recommandant à ses disciples de rendre d'abord à Dieu le culte prescrit par la loi, Pythagore voulait qu'ils reconnussent l'obligation de se soumettre aux manifestations culturelles, telles qu'elles étaient établies alors par les traditions religieuses. Les initiés pythagoriciens pouvaient, en effet, accepter sans arrière-pensée cette prescription de haute tolérance religieuse, parce qu'ils avaient appris que les dieux du polythéisme constituaient simplement des représentations du Dieu Unique, sous autant d'aspects différents qu'il existait de groupes d'obligations distinctes à imposer au peuple. Ils savaient, d'autre part, que les religions, du fait de leur fondement ésotérique commun, renferment toutes une part importante de vérités et que tout en lui donnant des noms différents, elles adorent en réalité, sans s'en douter, le même Dieu, l'Unique Créateur de tout ce qui est. Aussi, admettaient-ils que, du moment qu'il obéit aux lois divines de droiture et aux lois naturelles de bon ordre, un homme est exaucé dans ses voeux et béni dans sa vie, quels que soient le rite religieux et le langage qu'il emploie. Cette puissante clairvoyance les garantissait contre toute intolérance et leur permettait de prier avec une égale ferveur, dans des Temples de rite différent. Il leur était possible ainsi de donner partout le bon exemple de la foi et de la moralité."

Dr. Paul Carton, La vie sage. Commentaires sur les vers d'or des pythagoriciens. Editions Alain Labussière, 2009, pp. 35-6